La
femme vietnamienne
d'autrefois
et d’aujourd’hui
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Đặng Quốc Cơ
Paris
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. La
femme vietnamienne d'autrefois est courageuse et
dévouée à la famille, aide le mari dans les travaux des champs, (Chồng cầy
vợ cấy, con trâu đi bừa) s'occupe de la famille quand celui ci part à la
guerre :
'' Nay một thân nuôi già dậy trẻ ''
'' Con cò lặn lội bờ sông, gánh gạo đua chồng tiếng khóc nỉ non.
Nàng về nuôi cái cùng con, Để anh đi chẩy nước non Cao
Bằng '' ,
participe
même directement aux combats depuis l'aube de notre histoire avec Hai
Bà Trưng, Bà Triệu jusqu'aux guerres de libération contemporaines ( Giặc
đến nhà, đàn bà phải đánh ).
I-1 .Tòng phu
En temps de paix, par le monopole du petit commerce
qui génère les richesses, elle subvient aux besoins de toute la famille,
aide le fiancé étudiant sans ressources à faire ses études, et le mari
lettré ou mandarin toujours mal rémunéré, à joindre les deux bouts :
Quanh năm buôn bán ở ven sông,
nuôi đủ năm con với một chồng.
‘Tú
Xương)
Au XVIIème siècle, en épousant le Chinois, elle
contribue avec talent au commerce international. Elle gère le patrimoine
familial avec parcimonie, (Tay hòm chià khoá ),et
, quoi qu' en dise la théorie
confucéenne est pratiquement l'égal du mari dans la famille, depuis
le Code Hồng Đức. Ce code avait été promulgué par l'Empereur Lê Thánh Tôn en
1484 avait pris en considération les coutumes et moeurs du pays. La femme
mariée jouissait d'une capacité étendue, auprès de son mari, dans la direction
de la famille. Le Code Gia Long, promulgué en 1812 qui ne faisait que
reproduire la législation chinoise plaçait la femme sous la dépendance totale
du Chef de famille, tour à tour le père, puis de l'époux quand elle se marie,
puis du fils aîné au décès du mari : (Tam Tòng: Tại gia tòng phụ, xuất
giá tòng phu, phu tử tòng tử ). C'est la règle confucéenne des trois
fidélités, qui avec la théorie des quatre vertus (Tứ Đức: Công,Dung,Ngôn,Hạnh.)
( Etre habile dans son travail, modeste dans son
maintien, douce dans son langage, irréprochable dans sa conduite ) ont
consolidé la famille, la société, mais semblent enfermer la femme dans carcan,
et lui attribuer un rôle mineur sous l'autorité de l'homme.
I-2 Phu tòng !
Cependant la réalité est tout autre chez nous depuis
la période du Giao Chỉ.
car nous avons reçu des apports culturels autres que ceux du monde
sinisé: civilisations anciennes, cham, indiennes malaises, et occidentales modernes,
qui accordent beaucoup de considération à la femme.
Nos ancêtres du Văn Lang, du Giao Chỉ auraient vécu sous régime matriarcal: Âu
Cơ amenait avec elle 50 de ses enfants à la
montagne fonder le pays, les SoeursTrưng avaient
un état major de 27 généraux... femmes . Nous vénérons une multitude de femmes
que nous avons déifiées: La Sainte Mère Liễu
Hạnh qui n'est autre que la déesse Cham Po Nagar, Phật
Bà Quan Âm, le boddhisatva Avalokiteçevara que nous avons
féminisé, la Sainte Mère Thượng Ngàn ...
La femme règne depuis toujours dans le domaine familial, grâce à son
commerce de détail plus profitable que la culture du riz, elle mettait déjà en
pratique la devise Phi thương bất phú .
Elle est le pilier de la famille car l'homme est souvent absent ou
disparu à cause de la mobilisation ou de l'hécatombe des guerres incessantes.
Elle a toujours joui du droit à la propriété et possède le quart des terres
privées.
Je me souviens qu'une fois un conseiller américain m'a doucement
glissé à l'oreille ces mots: qui paie commande, quand je refusais de suivre ses
suggestions. Il en est de même dans les familles vietnamiennes où la femme
détient les cordons de la bourse, les clés de la cuisine. Bien qu'en apparence
et à l'extérieur elle parait soumise, très souvent c'est le mari qui obéit, qui
suit sa femme: PHU TÒNG, comme
dans le proverbe
Làm trai rưả bát quét nhà, vợ gọi thì dạ bẩm bà con
đây!
(L'homme fait la vaisselle, balaie la maison. Sa femme l'interpelle :'' Oui
Madame, je suis à vos ordres!''
Cependant Tòng
phu ou Phu tòng,
importe peu. L'essentiel est l'harmonie familiale.
II - La femme vietnamienne actuelle aspire à
l'égalité, à la liberté
II-1 : Égalité
Elle a droit à l'instruction, à la formation professionnelle, au travail
indépendant, à la liberté de domicile... Dans le pays l'analphabétisme a
quasiment disparu. La rénovation économique, đổi
mới, a stimulé la croissance économique et
créé des emplois. Mais la femme reste défavorisée dans la recherche du travail,
comme en France d'ailleurs, à cause de la maternité, des enfants en bas âge, du
travail domestique dont elle s'occupe plus que l'homme. 72% vivent à la
campagne et 28% à la ville et font surtout du petit commerce, souvent sur le
trottoir. Adroite, laborieuse, souple, capable de travailler et aussi de
diriger, elle contribue parfois aux succès des ateliers de confection de
chaussures, vêtements, montage électronique...à l' implantation des usines dans
notre pays. Consciente de cette capacité financière et de son niveau
d'instruction, elle se sent l'égal de l'homme et ne supporte plus la domination
abusive du mari et des parents ( Tam
tòng ). Travaillant plus que le mari au foyer et dans la
profession elle apprécie la reconnaissance de ses efforts par son époux.
Elle ne tolère plus le concubinage du mari
( Trai năm thê bẩy thiếp, gái chính chuyên một chồng
).
Elle
exige la fidélité réciproque, et peut brandir sa riposte :
'' Anh tham nhan sắc,
anh tình phụ tôi,
Đất rắn nặn chẳng nên nồi,
Anh đi lấy vợ cho tôi lấy chồng...''
II-2 Liberté
Elle garde l'amour et le respect pour ses parents mais pense que si ceux-ci ont
donné naissance à son corps, son âme et sa vie appartiennent à elle seule. Bien
que consciente que l'union libre née d'un coup de coeur sans mủre réflexion,
est souvent source de déception, elle refuse la décision de ses parents de lui
imposer un mari.( Cha mẹ đặt đâu con ngồi đấy ).
Elle est libre de vivre seule comme les garçons,
de choisir son travail, ses copains, son mari. Ainsi pour le mari et les
parents le temps est à la compréhension, la concertation.
II-3 Ce qu'elle attend du mari
Tendre et passionnée elle souhaite pouvoir être dévouée et soumise à l'homme
qu'elle aime et admire, l'appelle grand frère ( anh )
et se nomme petite soeur (em ).
Elle souhaiterait que le mari soit solide et stable: physiquement, c.a.d. fort
et sportif; sentimentalement, c.a.d. fidèle; financièrement c.a.d. avec argent
et travail; et mentalement: il sait décider et ne l'oblige pas à le
pousser par derrière. Bref elle souhaiterait qu'il soit une force
tranquille, capable de grandes décisions, qu'il soit
fort et doux, viril et délicat, solide et tendre, qu'il témoigne de ses marques
d'affection en présence des autresẠ.
Même quand elle tient son mari sous obédience au
foyer, elle n'en tire pas sujet de fierté. Elle aurait préféré pouvoir
obéir au mari ( Tòng phu ).
En tout cas elle a la délicatesse de montrer en public qu'elle est soumise.
Conciliante, elle veut que chacun fasse un effort pour comprendre l'autre, ne
s'enferme pas dans un mutisme indestructible.
Elle veut avant tout communiquer, elle comprend
que ''Le mariage est une concession permanente ''Ạ
II- 4 : À l'amour affectif la femme moderne attache une haute importance
Elle réclame un échange de pensées, une parole
d'amour, pas seulement l'acte suivi de l'assoupissement d'omne animal
triste". Elle apprécie que le mari montre
son amour, qu'il ajoute les mots ''
Bonne fête , je t'aime '' au
bouquet de fleur ou au cadeau d'anniversaire. Elle aimerait même qu'il devine
ce qu'elle attend. Elle souffre qu'il ne pense qu'à son travail et voudrait
qu'il réserve dans son coeur un compartiment pour elle.
Elle veut de la communication, c'est à dire que son mari soit à l'écoute de ses
attentes, partage ses aspirations. Il doit reconnaître son rôle de femme au
foyer (qui n'est pas celui de femme sans travail) et sa dimension maternelle,
car elle a porté et élevé les enfants. Il appréciera son accueil du soir,
avec le sourire, la baiser, la soupe bien préparée, les enfants affectueux qui
lui sautent au cou et le comblent.
Dans sa vie de couple la femme vietnamienne moderne concilie aussi ce côté
spirituel au côté charnel.
II- 5 : L'amour physique comble le couple
Il n'est plus tabou dans ce monde en évolution.
La femme actuelle soigne son charme physique, se fait belle d'une beauté qui
varie pour plaire à son conjoint , et aussi pour se faire plaisir à elle même.
Qui n'est pas fier d'avoir une femme jolie? La cosmétique, la coiffure, la
haute couture, un brin de parfum, la chirurgie plastique, les exercices physiques
effacent les injures du temps ( da mồi tóc sương, vú sếch lưng eo...) rendent la personne séduisante et charnelle
jusqu'à un âge avancé.
Mais à mesure que les forces et l'amour physique déclinent, les époux
s'appuient l'un sur l'autre, s'entraidant dans la compassion, et
craignant la séparation, s'aiment d'un amour plus passionné, dans leur coeur
uniquement. Nous n'oublierons jamais le douloureux spectacle de notre soeur
atteinte d'hémiplégie et de la maladie d'Alzheimer, réclamant son mari à cor et
à cri. Elle n'a plus que lui dans sa mémoire détruite. Avant les obsèques il a
fallu montrer le corps recouvert d'un drap, pour qu'elle se calme, assurée que
son mari dort toujours à ses côtés. Elle a perdu toute attache à la vie
sauf cet amour intense. Sa maladie mentale s'étant aggravée , '' l'oubli
fut sa félicité.'' ( Anatole France )
'' La femme moderne n'a plus de fausse pudeur et considère que l'amour
physique, manifestation privilégiée de l'amour, n'est pas un acte dégradant
comme nous a laissé croire une éducation prude. C'est le dialogue
privilégié de deux coeurs, à travers deux corps. La science amoureuse est non
seulement tolérée mais recommandée, tant qu'elle est au service de l'amour.
Bien que préoccupée de procurer du plaisir à son mari, elle sait rechercher son
propre plaisir.
Elle sait qu'en laissant monter la joie en elle, en
donnant à son mari le spectacle d'une femme heureuse elle le comblera mieux.
Elle ne cache plus son désir d'avoir un mari habile à l'épanouir. Elle lui sera
ensuite d'autant plus fidèlement attachée.''
Pour se préserver de la routine, elle sait mettre un brin de fantaisie (fig 7 )
dans l'amour, après avoir préparé un climat de tendresse ( fig.6 ), une
ambiance musicale dans un lieu romantique, un coin tranquille à l'abri
des oreilles indiscrètes, des sorties éclairs en amoureux (Vợ chồng đàu gối
má kề ), des week-ends conjugaux, et chaque année un
''voyage de noces'', sans les enfants. Ce besoin d'intimité, d'indépendance
amène le couple à s'envoler loin du nid familial.
II- 6 Les parents à distance
De notre temps, la femme exige un chez soi pour chacun, n'accepte plus la
belle mère de jadis. Il n'est pas bon pour le couple de vivre chez ses parents.
Ceux ci n'ont pas à s'immiscer dans les décisions des enfants, car cette
ingérence même motivée par de bonnes intentions a brisé bien de jeunes ménages.
Cette rupture fait souffrir les parents qui peuvent l'interpréter comme manque
d'amour, de piété filiale; ils se consolent en comprenant mieux l'intérêt des
enfants. Ceux ci compenseront cet éloignement par des visites fréquentes, des
coups de fils, des cadeaux, des sorties avec les petits enfants, des demandes
de conseil. Les jeunes couples pensent d'abord à l'harmonie du ménage, à
leurs enfants, à leur travail, à leurs vacances. Les vieux tromperont leur
solitude par des activités sociales, communautaires, touristiques, culturelles
qui permettent de se recycler pour enseigner aux petits enfants. Ils
chercheront à se rapprocher des amis de même âge, ayant les mêmes affinités. Si
vraiment vous pensez avoir fait plus que votre devoir à vos enfants, il faudra
raisonner comme De Gaulle et Winston Churchill qui ont ont été renversés après
avoir sauvé leur
patrie. ''
L'ingratitude est le signe d'un grand peuple'' ou comme Antoine Pinay qui a
redressé l'économie de la France , ''On m'oubliera très vite''. Or ce
n'est pas du tout le cas: les jeunes vous aiment mais dans ce monde stressant,
ils doivent d'abord penser à leur travail, à leurs enfants, à l'harmonie du
ménage, aux vacances nécessaires à la santé et à l'équilibre.
Bref
la modernité de la femme apporte des éléments nouveaux bénéfiques à la vie du
couple. Les parents doivent s'en réjouir.
II- 7 Les valeurs
morales
L'épouse moderne garde ses profondes racines traditionnelles morales et
religieuses et même parfois le concept de sacro-sainte fidélité à un seul
homme, fut il mort ou disparu. ( Liệt
nữ bất canh nhị phu ).
Comme la mariée d'antan elle refuse les déclarations
tardives d'amour de l'ami d'autrefois, lui reproche de n'avoir pas demandé sa
main quand elle était encore libre :
'' Ba
đồng một mớ trầu cay,
Sao anh chẳng hỏi những ngày còn không...''.
En cas de décès ou de longue absence elle fait
preuve de fidélité et de dévouement indéfectibles, , à l'homme qu'elle aime et
qui s'est montré digne d'elle. Comme Kiều elle
pourrait se jeter sur les flots du fleuve Tiền
Đường pour ne pas survivre à Từ
Hải qu'elle adore, et dont elle a causé la mort.) ou
comme la mère de la légende Hòn vọng phu ,
elle gravira la montagne avec son enfant, scrutera l'horizon, se transformera
en statue de pierre dans l'attente du mariẠ.
Rendons hommage aux femmes de combattants qui se sont dévouées pour soutenir la
famille pendant la guerre, et à celles des réactionnaires ( ngụy )
internés dans les camps de rééducation qui ont payé de leur personne pour les
sauver de la privation et de la mort. Nous saluons en passant le
dévouement l'épouse française du Médecin Général Chef du Service de Santé
Militaire du Sud Viet Nam qui est restée au pays, a dủ travailler comme
secrétaire pour ravitailler son mari emprisonné et le sortir du pays.
La femme vietnamienne moderne reste imprégnée des préceptes moraux des contes,
légendes et poèmes nationaux qu'elle a appris pendant son
jeune âge, et harmonise les apports de l'Occident à la vieille culture
vietnamienne.
Bibliographie
-
Nguyễn thé Anh et Léon Vandermeesch. Aspects
de la Culture Vietnamienne .Bản sắc Văn Hóa Viet Nam Ouvrage
collectif sous la supervision des Pr Ed.Làng
Văn , en cours d'impression.
- Pham Thị Nhung, Lê Hữu Mục, Đặng Vũ Nhuế, Đặng Quốc Cơ Truyên
Kiều và Tuổi Trẻ 2ème Edition.. Ed.
Làng Văn
-
Denis Sonet Réussir notre couple.. Ed.Droguet
Ardent
- Denis Sonet. L'Art
d'être Parents et Grands Parents. Ed.
Du Livre ouvert.
- J. Nguyễn Huy Lai La Tradition religieuse spirituelle soviale au
ViêtNam.. Ed.Beauchesne.
- Bùi văn Bảo. Lîch
Sử bằng tranh. Ed. Quê
Hương
http://ttntt.free.fr/archive/dangquocco.html
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